Pays-bas
La destruction de mausolées à Tombouctou, légendaire ville sanctuaire malienne, est le fruit de la négligence des colonisateurs français, a déclaré lundi l'avocate d'un djihadiste jugé pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité devant la Cour pénale internationale (CPI).
Sous le joug djihadiste, une vague de destructions s'est abattue en 2012 et 2013 sur la ville fondée entre le Ve et le XIIe siècle par les tribus touareg et surnommée "la ville des 333 saints" pour le nombre de sages musulmans qui y sont enterrés.
"Les événements de l'année 2012 sont le fruit de la corruption, et de la négligence des colonisateurs français", a déclaré devant les juges de la CPI Melinda Taylor, avocate de Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, dit Al Hassan.
Al Hassan, 44 ans, ressortissant malien et père de cinq enfants, est jugé pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité devant la CPI, qui siège à La Haye. Il est accusé de torture, viols et esclavage sexuel commis dans le contexte de mariages forcés, et de destruction de mausolées à Tombouctou, surnommée "la Perle du désert".
"L'État du Mali était une fiction créée par les colonisateurs français qui a existé sur le papier mais jamais en réalité", a poursuivi Melinda Taylor. Les Français ont "laissé le nord du pays se débrouiller tout seul" et ce conformément aux pratiques tribales et religieuses, a-t-elle ajouté.
Al Hassan, dont le procès s'est ouvert en 2020, était une figure-clé de la police islamique et du système judiciaire instaurés par les djihadistes dans le nord du Mali en 2012, selon l'accusation. "La question ne consiste pas à savoir si ces crimes ont été commis à Tombouctou mais si cette personne assise devant vous doit porter la responsabilité de ces crimes", a déclaré l'avocate d'Al Hassan.
L'avocate de plaider qu'al Hassan n'était qu'un membre de la police islamique, à une époque où les autorités maliennes étaient en plein désarroi, qui était "obligé de respecter et d'exécuter les décisions du tribunal islamique". Et de poursuivre : "C'est ce que font les polices du monde entier".
Melinda Taylor a déclaré que s'il avait désobéi aux ordres du tribunal, il aurait "risqué d'être qualifié de traître et d'espion", et aurait pu être exécuté. Toute tentative de fuite du Mali aurait mis sa famille en danger, a-t-elle ajouté.
"Al Hassan ne devrait pas être condamné parce qu'il se trouve qu'il a vécu au mauvais endroit au mauvais moment et du fait de son appartenance ethnique", a soulevé Melinda Taylor. Il était "religieux mais ce n'était pas un extrémiste", il allait à des concerts à Tombouctou et "flirtait avec des filles", a-t-elle précisé.
Al Hassan est le deuxième djihadiste malien jugé par la CPI pour la destruction des sanctuaires de Tombouctou, un site inscrit par l'Unesco au Patrimoine mondial de l'humanité. La Cour a condamné en 2016 Ahmad Al Faqi Al Mahdi à neuf ans de prison.
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